Peut-on licencier un salarié, en cas de maladie ?
Notions d’incapacité, d’invalidité et d’inaptitude
En la matière, les concepts et les notions sont proches mais ne recouvrent pas les mêmes situations et les même problématiques.
Incapacité : Etat d’une personne à la suite d’une blessure ou d’une maladie qui est incapable de travailler ou d’accomplir certains actes. Un salarié en arrêt maladie est en incapacité. Il bénéficie sous conditions d’ancienneté d’un maintien de salaire à 90 puis 66,66% grâce aux indemnités journalières de sécurité sociale et le complément versé par ISICA. Au-delà de la période des trois ans d’arrêts de maladie indemnisés ou en cas de stabilisation de l’état de santé, la Sécurité Sociale déclenche, sous certaines conditions, l’invalidité.
Inaptitude : Etat d’une personne dans l’impossibilité physique ou psychique de réaliser toutes les tâches liées à son emploi. C’est le médecin du travail de l’entreprise qui décide si la personne est considérée apte ou inapte à reprendre son travail (fatigabilité, position debout impossible, charges à porter…). De là s’enclenche une procédure particulière de recherche de reclassement qui peut déboucher sur un licenciement.
Invalidité : Etat d’une personne ayant subi d’une manière durable une réduction des 2/3 de sa capacité de travail ou de gain. Il s’agit là d’une notion de sécurité sociale. Il n’y a pas de lien direct avec le droit du travail au sens strict, pas de conséquence directe sur le contrat de travail. Par exemple, on ne peut licencier un salarié au seul motif qu’il a été déclaré invalide. Le licenciement sera, en règle générale dans ce cas, motivée par l’inaptitude.
Interdiction de licencier un salarié en raison de son état de santé
La maladie n’est pas, à elle seule, une cause de licenciement ; il faut pour cela une décision d’inaptitude du médecin du travail ou que l’absence liée à la maladie cause un trouble dans l’entreprise rendant nécessaire le remplacement définitif du salarié.
L’employeur qui veut rompre le contrat de travail d’un salarié malade ne peut le faire que si l’absence du salarié désorganise l’entreprise et qu’elle nécessite un remplacement définitif.
Attention, la Convention Collective a instauré une garantie d’emploi de 12 mois.
Autrement dit, pas de licenciement si le salarié est absent depuis moins d’un an.
Seul le recours au CDD de remplacement est possible pendant ce temps. Le Contrat « nouvelles embauches » plus souple sera sans doute plus approprié bien que cela ne soit pas sa véritable vocation.Cette clause conventionnelle s’applique aussi bien à l’absence prolongée qu’aux absences répétées, ce qui peut se révéler particulièrement « paralysant » pour l’employeur lorsque le salarié a de courtes absences successives.
En effet, pour vérifier si la période de garantie d’emploi est écoulée, il n’est pas possible, de totaliser les durées de plusieurs absences échelonnées. On ne doit prendre en compte que l’absence continue.
En pratique, il est donc impossible de licencier un salarié malade qui sera revenu (opportunément ?) travailler quelques temps dans l’entreprise.
Dans de tels cas, ce n’est plus le régime de la maladie qui s’appliquera mais sans aucun doute celui de l’inaptitude au travail (voir la suite de cet article).
Si toutefois, un salarié est absent depuis plus d’un an et que vous souhaitez le licencier (parfois à sa demande d’ailleurs), pas de précipitation. Ce n’est pas parce que la période d’un an est passée que cela légitimise le licenciement.
En effet:
- le licenciement n’est valable que si l’employeur démontre que le fonctionnement de l’entreprise est perturbé par l’absence prolongée ou les absences répétées du salarié et que ces perturbations rendent nécessaires le remplacement définitif du salarié absent ;
- l’employeur ne doit pas licencier le salarié au moment où l’absence a cessé, c’est-à-dire à son retour. A cette date, il ne peut plus en effet invoquer la nécessité d’un remplacement définitif ;
- il ne doit pas non plus licencier le salarié peu avant la fin d’un arrêt de travail à un moment précisément où le retour du salarié dans l’entreprise est imminent ;
Un conseil : l’employeur a tout intérêt, avant de lancer la procédure, à s’enquérir de l’état de santé du salarié et à lui demander s’il envisage une reprise prochaine du travail.
La perturbation liée à l’absence doit donc rendre nécessaire un remplacement définitif. En tout état de cause, c’est à l’employeur de prouver :
- qu’il y a perturbation dans le bon fonctionnement de l’entreprise, ce qui va au-delà d’une simple gêne ;
- et que cette perturbation importante le contraint à remplacer définitivement le salarié malade. Il n’est pas exigé que ce remplacement définitif ait déjà eu lieu au moment du licenciement, mais dans le cas d’une absence prolongée, c’est préférable.
En cas de litige, le juge apprécie la situation en tenant compte notamment de l’activité de l’entreprise, de ses effectifs, des fonctions occupées par le salarié malade, du nombre ou de la durée des absences, de leur caractère inopiné, imprévisible.
Pour pouvoir licencier un salarié malade, il faut donc que l’entreprise ne soit pas en mesure de le remplacer aisément ou provisoirement. Cette impossibilité peut être liée au niveau de responsabilité du salarié, à sa technicité, à l’exigence d’une formation longue sur le poste pour être opérationnel, mais également au marché de l’emploi local.
Dans nos professions qui souffrent d’une pénurie de main d’œuvre qualifiée, comment, en effet penser que des salariés compétents puissent accepter d’être embauchés en CDD avec le risque de voir leur contrat de travail rompu à une date impossible à déterminée puisque dépendant du retour du salarié malade et quelques fois de son bon vouloir ?
L’employeur qui met fin au contrat de travail en raison de la maladie doit respecter la procédure de licenciement :
Entretien préalable
L’employeur doit, dans tous les cas, convoquer le salarié à un entretien préalable en faisant tout son possible pour permettre au salarié de bénéficier réellement de cet entretien :
- il devra donc le convoquer pendant ses heures de sortie autorisées. Si le salarié ne se présente pas, la procédure se poursuivra par l’envoi de la lettre de licenciement ;
- si le salarié est dans l’impossibilité de se déplacer, l’employeur doit fixer l’entretien de manière à ce que le salarié puisse se faire représenter, qu’il puisse prendre connaissance des motifs du licenciement, et enfin, qu’il soit mis en mesure de présenter ses observations.
Lettre de licenciement :
Elle devra obligatoirement expliquer la nécessité du remplacement définitif du salarié (voir plus haut)
Préavis
Le salarié, non dispensé de faire son préavis, qui est dans l’incapacité physique de l’exécuter n’a pas droit à une indemnité compensatrice de préavis. Le contrat se termine au terme du préavis non exécuté.
Droit individuel à la formation
Le salarié licencié pour absences répétées ou maladie prolongée conserve les droits qu’il a acquis dans le cadre du DIF.
Indemnité de licenciement
Le salarié licencié dans le cadre de son absence maladie a droit à l’indemnité conventionnelle de licenciement (10% de mois de salaire par année d’ancienneté et après 10 ans d’ancienneté 20% de mois par année d’ancienneté).